Renouveler les rituels ? Pourquoi pas la distribution du courrier…..

 

Les rituels en maternelle revêtent une importance toute particulière. Ils ne doivent pas être un simple passage obligé sous prétexte qu’ils font partie de l’emploi du temps. En fait, ils doivent être vécus par l’enseignant et les élèves comme de véritables situations d’apprentissage. Le fait qu’ils soient répétés chaque jour permet un ancrage solide des compétences qui y sont travaillées.

Toutefois nous ne devons pas nous laisser piéger par le mot “rituels” qui dans sa définition classique évoque une chose réglée par une coutume immuable. A l’école, il ne s’agit pas de répéter éternellement la même chose dans son contenu. Ce qui est rituel, c’est le créneau horaire (en principe après l’accueil) et la forme que revêt l’activité (en principe regroupement).
On connaît bien sûr les rituels les plus classiques :
   o Date
   o Calendrier hebdomadaire
   o Calendrier mensuel
   o Nombre de présents et d’absents
   o Appel cantine
   o Météo…

Ces derniers permettent bien sûr des apprentissages divers et fort intéressants mais deviendraient vite lassants s’ils restaient figés tout au long de l’année. Il sera donc nécessaire d’organiser sur ces derniers, comme on le fait dans tout autre domaine, une progression. Cette dernière s’appliquera à la fois :

- Sur les compétences visées EX :
         o Il est plus facile de dénombrer les absents que les présents. : c’est ici l’étendue de la comptine numérique et les principes du dénombrement qui sont en jeu
         o Il est plus facile de dire le nombre de présents que de le montrer sur la frise numérique : c’est ici la connaissance des cardinaux qui est en jeu
         o Il est plus facile de dénombrer les présents que d’en déduire le nombre d’après le nombre d’absents : c’est ici un travail sur la manipulation de la frise numérique ou un travail de décomptage qui est en jeu.
         o Etc…

- Sur les supports EX :
         o Le calendrier linéaire permettra dans un premier temps d’organiser les jours de la semaine, de symboliser l’axe du temps, de repérer des répétitions…
         o Le calendrier sous forme de tableau à double entrée permettra d’organiser ces répétitions, d’aborder les notions de lignes, de colonnes, d’intersection…
         o les calendriers avec collage d’éphémérides permettront de prendre en charge la confection du calendrier jour après jour
         o la présentation et l’utilisation de multiples calendriers permettront de définir les constantes…

Mais, il est également possible, lorsque le maître estime qu’un rituel n’apporte plus rien à ses élèves (le rituel météo par exemple a-t-il encore sa place après quelques semaines d’utilisation ?) d’introduire des rituels nouveaux. Il est possible par exemple, à partir d’une manipulation connue, la réussite, de créer un jeu mathématique "la réussite de la classe", mettant en œuvre de nombreuses compétences.
Ce jeu peut très bien prendre place dans le créneau des rituels durant quelque temps. ainsi, il s’agira de réaliser collectivement chaque matin la “réussite” de la classe…..

Je vais maintenant vous proposer une activité que vous pourrez également utiliser de manière rituelle, tous les matins, mais celle-ci aura l’originalité de ne s’adresser qu’à un ou deux élèves à la fois. Les élèves à tour de rôle, pendant le créneau des rituels, s’extrairont du groupe pour aller effectuer la “tournée du facteur”. Comme son nom l’indique, l’activité consistera à distribuer le “courrier du jour”.

1) principales compétences ou savoirs visés à travers cette activité
       a. analyse de la structure urbaine et donc de l’espace
       b. dénombrement
       c. connaissance et reconnaissance des lettres
       d. correspondance entre majuscules et minuscules
       e. aspect générique des lettres par l’utilisation de polices multiples
       f. apprentissage de l’alphabet
       g. classement de mots suivant l’initiale (amorce de classement alphabétique)

2) fabrication du support :

Il faudra faire fabriquer aux élèves la maquette d’un village, ou d’un quartier... Bien sûr, si l’on introduit cette activité alors que l’on est en train de travailler sur le thème de la ville cette production s’intègrera parfaitement au travail général. Mais cette activité peut également être le produit d’un projet interdisciplinaire autonome (structuration de l’espace, citoyenneté, lecture, arts plastiques…). Le maître devra alors le présenter aux élèves dans le cadre d’un moment langagier et organiser les étapes de la production.

Un grand carton ou une plaque d’isorel d’environ 1.20m*0.90 m servira de base et assurera la rigidité de la maquette.
Le maître aura ensuite intérêt à contre coller sur ce support du papier dessin de manière à travailler sur une surface claire.

La réalisation de la maquette se fera en deux phases principales :
      1 la première proposera un travail sur le plan : tracés des rues, emplacement et disposition des maisons, espaces réservés aux jardins privés ou publics, places, ronds points éventuels…
      2 la seconde proposera un travail sur les volumes : fabrication des maisons et collages de ces dernières….

Phase 1 :
Si l’on adopte une démarche de projet, il faudra se poser la question suivante : que doivent apprendre les élèves pour pouvoir réaliser un tel travail ? Dès lors, il apparaît évident que pour réaliser une maquette il est nécessaire d’avoir une représentation claire de ce qu’est un village, voire un quartier…On pourra pour cela bien évidemment effectuer une sortie dont le but sera en l’occurrence clairement déterminé, mais on pourra également avoir recours à des livres, à des œuvres artistiques, à des plans simples, ce qui débouchera sur des situations langagières et une ébauche écrite de ce qu’est un village ou un quartier. Ce sera l’occasion de fixer le vocabulaire urbain (rue, avenue, boulevard, impasse…immeuble, appartement, pavillon, villa…etc) et de définir la fonction de certains bâtiments publics (mairie….).

Des essais, des recherches, des propositions de plan pourront alors être réalisées par groupe. Les enfants travailleront avec des crayons à papier et des gommes et auront pour référent le document réalisé collectivement, document qui sera en quelque sorte un cahier des charges. Ainsi, il devra y avoir sur leur plan : la mairie, l’église, la poste, l’école, des rues….etc…

Un plan collectif sera ensuite réalisé avec le maître au tableau pour être ensuite reproduit sur le support définitif. A cette étape-là, l’emplacement des maisons pourra être tracé en utilisant une grosse boîte d’allumettes comme gabarit et en dessinant son contour. C’est là que les élèves prendront conscience d’un fait jusqu’alors souvent non perçu : les maisons n’ont pas toutes la même orientation ! Il faudra aussi penser à situer les autres bâtiments et à leur réserver un espace suffisant…

26 maisons (une pour chaque lettre de l’alphabet) devront être au total réparties sur le plan.

Ce dernier réalisé sous forme de tracé sera ensuite, dans le cadre d’ateliers plastiques, peint et décoré.

Phase 2 :

La fabrication des maisons peut s’envisager de différentes manières. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue l’objectif d’une telle production : il faut que les maisons possèdent une boîte aux lettres facilement accessible aussi bien pour déposer le courrier que pour le retirer!

Personnellement, j’ai utilisé comme base de fabrication une grosse boîte d’allumettes. Il suffit de laisser la boîte à peine entrouverte pour disposer d’une boîte aux lettres très fonctionnelle, la seule contrainte étant de ne pas disposer les maisons côte à côte. Par contre, trois boîtes empilées peuvent constituer un petit immeuble…
Il sera facile, en utilisant du carton ondulé, de fabriquer un toit à deux pentes….
L’école, la mairie, l’église… pourront être fabriquées dans de petits cartons d’emballage…le maître prenant bien évidemment en charge les manipulations et les réalisations trop difficiles : fabrication d’une pyramide pour le clocher de l’église par exemple…
Toutes les maisons et bâtiments seront collés pour terminer la maquette.

Une lettre de l’alphabet en majuscule d’imprimerie, bien visible, sera collée à l’aide de patafix (pas de collage définitif) sur chaque maison (ou appartement) .
Selon les compétences visées, le maître pourra placer les lettres de manière totalement aléatoire ou au contraire organiser l’espace en respectant l’ordre alphabétique.

 

3) L’activité distribution du courrier

Pour compléter la maquette désormais opérationnelle, le maître achètera dans le commerce une voiture miniature de la poste.

L’activité proprement dite consistera pour l’élève à distribuer, dans les boîtes aux lettres, le courrier que le maître aura déposé dans un endroit précis et convenu.

Ce courrier pourra être constitué de
     o Simples lettres de l’alphabet (des planches de lettres existent dans le commerce, on peut aussi les éditer sur ordinateur…)
Bien sûr les lettres pourront être des lettres majuscules correspondant donc strictement aux lettres adresse. Mais on pourra également offrir à la distribution des lettres scripts minuscules, des lettres cursives minuscules, des lettres en italique ou des lettres éditées dans des polices multiples, ce qui familiarisera l’élève avec l’aspect générique de la lettre.
     o Prénoms de la classe
     o Mots de différents corpus travaillés (semaine, consignes, couleurs, personnages…)

Le courrier proposé par le maître sera bien entendu donné en vrac. Le facteur pourra donc avec sa voiture :
     o distribuer les lettres les unes après les autres, effectuant ainsi de multiples trajets et revenant plusieurs fois à la même maison.
     o mettre en place une stratégie (celle que pratiquent tous les facteurs) de distribution en organisant au préalable son courrier : classement selon la lettre initiale. Celui-ci lui permettra de ne passer qu’une seule fois dans chaque maison
     o tenir compte de l’ordre des maisons dans la distributions et donc prendre en considération l’ordre alphabétique, ce qui à l’évidence constitue la stratégie experte.

Le passage d’une procédure à l’autre pourra faire l’objet de bilans collectifs….

Le maître pourra de son côté demander à un élève d’aller vérifier le courrier de la maison R ou T et de rapporter toutes les minuscules, mettant ainsi en œuvre la connaissance même du nom des lettres et de leurs caractéristiques.